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un monde ordinaire
28 mai 2007

le bal

LE BAL

« si les hommes ne dansaient pas sur les volcans, je me demande où et quand ils danseraient ; l’importance est de bien savoir qu’on a le volcan sous les pieds afin de goûter son vrai plaisir d’homme libre »(Jacques Perret)

« les danses s’établissent sur la poussière des morts, et les tombeaux poussent sous les pas de la joie »(François René de Chateaubriand)

Ce soir là, comme de nombreux soirs ces derniers temps, je hantais les quais de

la Gironde. Je

déambulai, tête baissée, les mains dans les poches, marmonnant dans ma moustache. Encore une fois, dans un flot incalculable d’alcool, j’avais tenté de noyer mes misères, mais celles-ci persistaient et restaient à la surface, pouvant se voir sur les moindres recoins de ma peau.

Mon errance me fit parcourir plusieurs centaines de mètres, quand tout à coup, je sentis comme une petite piqûre. C’était une note de musique. Elle m’avait atteint et, aussi étrange que cela puisse l’être, avait fait sortir de la particule qu’elle avait touchée, un brin de tristesse qui m’habitait constamment. Tout à coup, une autre piqûre, puis une autre, et une autre, chacune ayant le même effet sur moi que la première, elle chassait ma mélancolie. A chaque piqûre, la sensation était étrange, mais pas désagréable. Je décida donc de suivre ce flot de notes afin d’en trouver la source.

Le chemin était aisé, plus j’avançais, plus les notes étaient nombreuses, j’accéléra le pas. Les piqûres me faisaient toujours le même effet, je me sentais comme plus léger à chaque pas, un sourire commençait même à se dessiner sur mon visage, ce qui ne m’était pas arriver depuis bien longtemps. Tout à coup, j’aperçus une lumière au loin. On voyait dans ce flot lumineux une rivière de notes de musique prenant la voix des airs, partant piquer d’autres malheureux. J’arrivais à la source. Si proche du but, je me mis à courir, et si léger que j’avais l’impression de ne faire qu’effleurer le sol. Lorsque j’atteins enfin l’entrée du bâtiment, je resta cloué sur place. C’était un grand hangar, très haut de plafond, très large et très long. Mais malgré l’immensité de la bâtisse, elle était pleine, pleine de notes de musique.

Au fond à gauche, les responsables de cette musique. Deux accordéons, un violon, une contrebasse et un banjo, avec derrière eux des musiciens les animant. Devant ceux-ci, un grand nombre de personnes dansaient sur la musique, sur leur visage resplendissait le bien-être. La partie droite était occupée par des gens accoudés au bar ou assis autour d’une table à discuter. Je décida de m’installer dans un coin afin d’observer ma découverte.

Tout d’abord mon attention se porta sur les gens en train de danser. Parfois ils étaient en ronde, en ligne ou en couple, mais toujours, les notes de musique les atteignaient et faisaient réagir leur corps, je me demandais même s’ils en restaient maître. Cela ne devait pas leur en soucier car leur visage était rayonnant, avec un grand sourire, une lueur brillait dans leur regard. Ils étaient heureux. De temps en temps, ils allaient s’asseoir autour d’une table, et là, le temps de quelques morceaux, ils discutaient, se reposaient en écoutant la musique. Le fait de rester inactifs ne semblaient pas les déranger, ils paraissaient sereins. Et puis quand ils se sentaient prêts, ils rejoignaient ceux qui dansaient avec les musiciens, comme s’ils ne s’étaient jamais arrêter de danser.

Certains préféraient s’accouder au comptoir et déguster du vin, qui, en parcourant les moindres recoins de leur corps leur réchauffait le cœur et apportait une petite pointe de gaieté qui s’apercevait dans le petit sautillement qu’ils avaient lorsque la musique les atteignait. Dans leur regard brillaient les plaisirs partagés de la musique et du bon vin.

Mon regard retourna se poser sur les danseurs. C’était une danse de couple. Chacun ressentait la musique différemment et leur corps réagissait en fonction.

Cependant, un couple attira mon attention. Alors que tout le monde vagabondait à travers l’espace, ces deux la semblaient immobiles. Enlacés comme pour danser, leur tête s’effleurant, ils semblaient ne pas bouger. Mais ce n’était que la première impression, car en les observant bien, j’aperçu leurs mouvements. Ils avaient tous les deux les yeux fermés, je suis sûr qu’ils en oubliaient les autres danseurs. Leur deux corps ne semblaient faire qu’un, on aurait dit un tronc d’arbre ondulant sur la musique. Contrairement aux autres, ils ne réagissaient pas à chaque note de musique, mais on aurait dit qu’un flot continu de musique habitait leur corps et le faisait suivre ses courbes, comme la mer à un bateau. Chaque vague provoquait une ondulation de leur corps.

C’est drôle, ils étaient là, en plein milieu, les autres leur tournant autour, et moi je ne voyais qu’eux, comme si un voile invisible cachait les autres. Leur danse dégageant tant de complicité, voire même d’intimité, que je détourna mon regard d’eux, me sentant à la fois heureux de les voir ainsi, et en même temps gêné.

La soirée se poursuivit jusque tard dans la nuit. Je ne revis qu’une seule fois mon couple danser, je fus aussi ému, mais autant gêné.

J’observa les gens toute la soirée, je n’osa pas allé danser, mais de les voir me remplissais du même bonheur qui les habitais.

Lorsque la soirée fini, les instruments furent rangés, les verres vidés et le parquet déserté, je m’en retourna chez moi.

Avant de me coucher, je tira une leçon de cette soirée. Il existe tellement de grands bonheurs autour de nous, que nous ne devons laisser de place à cette infinité de petits malheurs. Il faut profiter et non regretter.

Et de cette leçon je me fis une promesse : La prochaine fois, je danserai.

FIN

« danser est le fin mot de vivre et c’est par danser aussi soi-même qu’on peut seulement connaître quoi que ce soit : il faut s’approcher en dansant »(Jean Dubuffet)

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